Table des matières
Cet article est le premier d’une série sur le jeûne. Vous pouvez retrouver l’ensemble des articles :
- Le présent article vous montre comment les médias présentent le jeûne malgré des études probantes
- L’article suivant présente les différents types de jeûne et protocoles à suivre pour réussir son jeûne
- Le dernier article vous donne mon retour d’expérience personnel sur le jeûne.
Comment j’ai découvert le jeûne
C’est un dossier de trois articles que je voulais vous faire depuis longtemps, parce que le jeûne a été une des premières prise de conscience sur la nécessité de me responsabiliser au sujet de ma santé. Pourtant, en 2013, j’ai été le premier adversaire de mon grand frère lorsque celui-ci voulait entamer un jeûne long.
Je ne vais pas vous mentir. Les premières pensées, aussi loin que je me souvienne, ont été de me dire que c’était dangereux, que c’était un truc d’illuminés, un truc de secte quoi. A l’époque, je ne pouvais même pas dire « un truc à la mode », puisque pendant des décennies, le jeûne a de nouveau été mis au ban des thérapies de santé.
Rentré chez moi, j’ai quand même regardé le fabuleux reportage qu’il m’avait suggéré de regarder : « Le jeûne, une nouvelle thérapie », réalisé par Thierry de Lestrade. Et là, un petit choc ! Cela tenait la route scientifiquement.
J’ai alors dévoré les livres de Shelton, de Thierry de Lestrade et d’autres. Et ces histoires m’intriguaient grandement.
Il aura néanmoins fallu attendre quelques années avant que je ne le fasse. Et ce fut dans un moment de vie difficile, puisque cela a fait suite au décès de mon père. Pour faire vite, j’ai eu de très grosses lombalgies qui ont duré 2 mois. Aucun étiopathes, chiropraticiens, ostéopathes ou médecine n’avaient su quoi faire, quoi me dire. Les « thérapeutes manuels » m’avaient quand même dit que cela pouvait être lié au stress du deuil.
Dès que j’ai pu partir au calme dans le sud, je l’ai fait. J’ai jeûné 15 jours et mon mal de dos avait bien disparu. Mon moral est revenu et j’ai pu avancer. Mon frère avait donc raison : le jeûne, ça marche.
Que dit la « Science officielle » sur le jeûne
Je me rappelle clairement lui avoir mis sous les yeux des articles montrant que c’était dangereux. Il y avait ceux du journal Le Monde, qu’on peut encore trouver dans les archives ainsi que d’autres dans lesquelles des professeurs de médecine et autres médecins nutritionnistes clamaient haut et fort que c’est une hérésie de jeûner.
« C’est une hérésie. Il faut privilégier le bon sens alimentaire, la constance, l’équilibre. Le corps humain est conçu pour recevoir de la nourriture toutes les quatre heures. Sinon, on est dans une logique de survie, on crée du stress pour l’organisme »
Dr Laurence Plumey, médecin nutritionniste (article LeMonde.fr du 15/08/13)
De même un chercheur en nutrition de l’INRA nous affirme dans le même article :
« Il y a trop de risques à renoncer aux apports journaliers en nutriments fondamentaux, comme les protéines, les vitamines, les minéraux, les acides gras essentiels… Outre les carences, le jeûne a aussi la fâcheuse tendance à provoquer l' »effet yo-yo », à savoir l’alternance de pénurie et d’excès, de restriction et de compensation alimentaire. Et c’est alors pire car quand on mobilise un tissu adipeux, il suractive tous les mécanismes de réserves pour revenir à son état initial »
Pr Daniel Tomé (Ibid)
Pourtant, un an avant, le même journal faisait un article relativement élogieux, tout du moins pas à charge contre la pratique du jeûne court. Il cite par ailleurs, la référence mondiale qui a fait le pont entre le cancer et le jeûne : Dr Valter Longo.
« La combinaison de cycles courts de jeûne avec la chimiothérapie est soit plus efficace, soit nettement plus efficace que la chimiothérapie seule »
Dr Valter Longo, article LeMonde.fr du 08/02/2012
J’évoquerai aussi le reportage de 2015 dans le magazine de le santé sur France 5 où on trouve un pseudo-débat entre deux médecins totalement conditionnés par une manière de penser acquise sans aucun doute durant leur long cursus médical. Ils parlent d’études sans jamais les citer et se cache derrière un raisonnement qui, s’il tient la route dans leur modèle, ne correspond malheureusement pas à l’observation.
Deux questions me taraudent alors :
- Faut-il faire coller le modèle à l’observation ? ou l’observation au modèle ?
- Ont-ils au moins essayé ?
Qu’en est-il à notre époque ?
Eh bien, je suis tombé sur un article de science et avenir, de Doctissimo, , des hôpitaux de Genève ou un « grand » professeur est interviewé. J’ai aussi jeté un œil à une méta-analyse plus récente du NACRE[1] qui a produit un rapport pour évaluer l’efficacité du jeûne dans un protocole anti-cancer.
Science et Avenir se base sur une méta-analyse de l’INSERM, datant de 2014, pour conclure que sur 351 études, aucune n’ont significativement montré une amélioration.
Ah bon ? Nous verrons plus loin ce qu’il en est réellement.
Sans vous citer tout ce qui a été dit sur l’ensemble de ces articles et interviews écrits et publiés récemment, en somme, selon eux :
- Le jeûne de plus d’une semaine est dangereux ;
- Il faut faire attention à l’effet rebond, c’est-à-dire qu’on va reprendre deux fois plus de poids après, car le corps va emmagasiner plus de graisse ;
- Son unique utilité serait de faire maigrir ;
- Les prétendus effets sur la santé n’existent pas et serait liés à l’imagination…
En gros, ce sont les idées communes qui ressortent dans ce que j’ai rapidement trouvé sur internet. Ce sont d’ailleurs les mêmes arguments que ressortent beaucoup de personnes à qui l’on parle du jeûne pour la première fois.
Donc, en 7 ans, peu de choses semblent avoir changées.
Pour être tout à fait honnête, il y a quand même eu une prise de conscience d’une partie de la population. Ceux qui ont tenté le jeûne et qui, pour la majorité d’entre eux (pour ne pas dire tous) en sont ressortis suffisamment satisfaits pour le conseiller et participer, de fait, à son acceptation indéniable et de plus en plus visible, tant dans les magazines papiers que sur internet.
Je ne vais pas vous décrire tous les articles, mais uniquement celles qui s’appuient sur des études « sérieuses » parce qu’effectuées par des « organismes reconnues ». L’étude de l’INSERM, je l’ai scrutée du début à la fin, soit une soixante-dizaine de pages.
L’étude de l’INSERM
Alors, contrairement à ce qu’a écrit Science et Avenir, ce n’est pas 351 études, mais 25, dont 12 comparatives, 9 observationnelles pour étudier respectivement les effets et l’innocuité. Pourquoi ont-ils écrit 351 ? Parce que c’est le nombre d’études qui est apparu dans le moteur de recherche Pubmed.
Comme il s’agit d’une méta-analyse[2], ils ont ensuite opéré dessus des critères de recherche que je ne commenterai pas mais qui figure ci-dessous.
Figure 1: critère d’exclusion de l’analyse de l’INSERM, 25 études retnues
Je ne vais vous faire tout le document : inutile et chronophage. J’aimerais juste attirer votre attention sur les conclusions des auteurs – que les rédacteurs de l’INSERM ont quand eu la gentillesse de ne pas déformer – qui, de façon presqu’unanimes sur ces 25 études, montrent une amélioration significative !
Je vous mets quelques images de ce rapport que vous pourrez vous-même télécharger si vous êtes curieux. Ces images concernent notamment pour la polyarthrite rhumatoïde, les troubles digestifs fonctionnels et l’hypertension.
Figure 2 : résultats d’un jeûne pour la PR (polyarthrite rumathoïde)
Figure 3 : conclusion pour la PR
Voyons pour le jeûne et l’hypertension artérielle ?
Figure 4: conclusion pour le traitement de l‘hypertension (HTA)
Pour les troubles digestifs fonctionnels ?
Et la conclusion, que dit-elle ? Ben, je vous laisse vous-même lire.
Grosso modo, ils invoquent des problèmes méthodologiques, la complexité d’interprétation des résultats, le problème lié à la faiblesse du nombre de sujets, etc.
Autrement dit, ils nous informent qu’il y a des biais et que ce n’est pas simple. Or, l’étude du corps humain dans son environnement possède forcément des biais dans la mesure où tous les paramètres ne peuvent être contrôlés. C’est d’autant plus vrai dans le cas d’un jeûne. Comme peut-on satisfaire le paramètre de randomisation ? Pourtant, une partie de ces études avaient un groupe de contrôle et les conclusions ont été effectuées parfois à partir d’indicateurs biologiques réels et tangibles. Du moins, ce sont les mêmes indicateurs que la médecine utilise pour diagnostiquer et prescrire.
Toutes les études, quelles qu’elles soient, portent sur sujet multifactorielle et on ne pourra donc jamais avoir une certitude absolue. Tout au plus peut-on avoir « une propension à penser que ». Et cela a toujours été comme ça. Pourtant, la « science médicale officielle » s’appuie sue ce même type d’études pour autoriser ou non la mise sur le marché une molécule, par exemple.
Je vous laisse regarder cette méta-analyse et vous faire votre propre idée.
Théoriquement, ces résultats auraient dû nous conduire vers un enthousiasme débordant, relayé par les revues et les médias afin d’avoir un maximum de personnes aptes à se porter volontaire. D’autant plus que toutes ces études n’ont montré aucun évènement indésirable (je vous mets l’extrait pour une étude et vous invite à regarder le reste)
Figure 5: absence d’effets indésirables pour la PR
En effet, être payé pour être chouchouté une semaine dans une clinique ou un hôpital, en ayant en tête une forte probabilité d’aller mieux et ce, sans effets indésirables…je crois que beaucoup signeraient. Il suffit d’ailleurs de voir l’engouement que suscitent les séjours « Jeûne et randonnées ». Le nombre d’inscriptions explose depuis quelques années.
Cela permettrait pourtant de répondre, enfin, à la nécessité d’avoir une population plus importante pour les peupler les cohortes des études scientifiques portant sur le jeûne et ses bienfaits.
Cette conclusion n’a, selon moi, pas de sens.
A part cela, je tiens à souligner que les conditions des études citée par cette méta-analyse sont tout de même particulières. Ce ne sont pas des jeûnes à l’eau mais des jeûnes « Buchinger » d’une moyenne de 8 jours. Le principe est d’ingérer moins de 250Kcal par jour afin de passer tranquillement la phase d’acidose (cf. plus loin).
Or, cette même clinique obtient des meilleurs résultats à partir de 12 jours de jeûne. Il n’y a qu’un pas pour penser que les améliorations significatives relevées auraient été encore plus nettes.
L’étude du NACRE
S’il n’y avait que l’étude de l’INSERM. Celle du NACRE est du même acabit. Je ne vais pour refaire le coup des copies-écrans. Je l’avais étudié à sa sortie en 2017, car sa date de parution m’avait parue suspecte.
En effet, elle est sortie presqu’en même temps que le colloque organisé par Jean-Jacques Trochon, un patient expert, pilote de son état, qui en plus d’avoir échappé au cancer grâce au jeûne, avait remué ciel et terre pour réunir autour d’un colloque les pro-jeûnes (dont le Dr Valter Longo) et les plus suspicieux. « Rethinking Cancer » s’est déroulé à Gustave Roussy, l’antre de la cancérologie en France.
Après trois ans, rien ne semble avoir bougé, donc. Je dis ça, je ne dis rien.
Revenons à l’étude du NACRE. En faisant le même travail, j’ai remarqué que les conclusions partielles ne reflétaient pas les résultats obtenus et que la conclusion finale reflétait encore moins l’ensemble des conclusions partielles. Evidemment, dans le mauvais sens, c’est-à-dire allant à l’encontre de la pratique du jeûne thérapeutique.
Pourtant, vous m’accorderez que lorsqu’on observe une amélioration de 6-7 personnes sur 10, on ne peut pas juste conclure que ça ne fonctionne pas.
Avant de passer à la prochaine partie qui sera plus gaie, on s’aperçoit bien que ce que rapporte les journaux n’est pas, à mon sens, très rigoureux pour ne pas dire sérieux. Remarquez, ce n’est pas leur faute, puisque, comme beaucoup de médecins, ils ne lisent que les conclusions. D’ailleurs, lorsque je faisais de la recherche, j’avais déjà remarqué ce genre de pratique très fréquentes et je me dis aujourd’hui que ce doit être une technique pour satisfaire les commanditaires de l’étude.
Pour les « professeurs de médecine » interviewés, leurs réponses ne m’étonnent guère. En faculté de médecine, j’ai entendu dire de la bouche même de ma prof de nutrition, que jeûner 4 jours commençait à être dangereux et qu’une semaine pourrait entraîner la mort par inanition. J’aurais dû l’enregistrer. C’est dommage parce que quand je la regardais, je voyais bien qu’un petit jeûne l’aurait remise sur pied (car notez bien que beaucoup de médecins n’ont pas l’air en très bonne santé).
Cela étant dit, nous allons
passer au prochain article. On parlera exclusivement du jeûne : pourquoi,
quand, comment. En attendant sa sortie, prenez soin de vous et à très bientôt !
[1] Réseau National Alimentation Cancer Recherche
[2] Rassemblement d’un ensemble d’articles selon certains critères afin d’en étudier le contenu
Trackbacks / Pingbacks